Suivre son instinct, vivre au jour le jour et ne plus soucier que de soi-même. Voilà mon let-motive depuis mon arrivée sur l'ile. Je marchais au hasard, au gré des vents et des marées, sur la plage, dans la foret jusqu'à découvrir mon paradis. Un petit lieu caché des hommes connu seulement des habitus d'Onassis. Une crique paradisiaque, a l'eau limpide et somptueuse. Une antre mythologique où l'on peut sans problème imaginé des sirènes en émerger.

Comme à mon habitude, je m'installais les pieds dans l'eau aux premières heures de la matinée. Me laissant bercer par le silence de ce sanctuaire, l'esprit ailleurs, me remémorant les meilleurs moments de ma vie passée ainsi que les raisons qui m'ont poussé à fouler le sol de cet ilot paradisiaque. Des indices, des questions, des mystères autour d'un être inconnu, un mystérieux apollon, seul objet de mes pensée, visiteur de mes nuits, de mes rêves et de mes cauchemars. Au fond, j'étais persuadé que la solution se trouvait ici sur l'ile, que rien n'était le fruit du hasard et qu'en ce beau matin dans ce lieu, j'allais vivre une parenthèse nécessaire de ma courte existence.

elle ne sortait plus de sa tête. c'était affreux, envoûtant, envahissant. juliet, juliet, juliet, depuis qu'elle était arrivée, elle hantait ses pensées, ses rêves, le moindre de ses fantasmes où ses cheveux blonds chatouillaient sa peau nue. soupir. fermant les paupières, elle quitta la maison de bon matin. le soleil commençait tout juste à se lever et ses pas la menèrent sans qu'elle n'y songe réellement, à la source, non loin de là. elle aurait aimé pouvoir se perdre dans les entrailles de l'île, retrouver l'insouciance de son enfance, tout oublier. elle aurait aimé se retrouver, elle, son instinct, robinson des temps modernes. mais ce temps était fini, révolu. elle était grande à présent. avec des envies, des désirs, bien trop présents. juliet. sans le vouloir, son prénom glissa entre ses lèvres. c'était malsain, déraisonnable. elle repartirait bientôt pour le continent, loin de ce petit coin de paradis. paradis ? il était son enfers personnel, son tartare rien qu'à elle. elle tombait, tombait, tombait, sans fin. c'était sans issue. mais elle releva la tête. elle n'était pas seule. une jeune femme. brune. à quelques pas d'elle. elle ne semblait pas l'avoir remarqué. on n'avait pas idée de déranger les gens qui venaient se ressourcer ici. c'était comme un accord tacite entre les habitants de l'île. respecter les secrets des touristes, des gens de passage. parce que la demoiselle n'était décidément pas une habitante. quelque chose en elle criait son appartenance au continent. quelque chose l'intriguait. son regard, sans doute. elle semblait perdue. ellie était guide après tout. il était de son grand devoir de lui montrer le chemin.

Un souffle, un sentiment étrange et voilà que ma tête déviait. Je regardais à mes côtés, quelques brefs instants, suffisants pour remarquer que ma solitude venait d'être abrégée. Déçu, non, plutôt surprise, surprise qu'un être vienne aussi ici si tôt dans la journée. Alors que la plupart des badauds vivant sur l'ile ne se réveillaient que deux, trois heures plus tard. Que faire ? Quoi dire ? Je ne savais pas. En même temps c'était mon tête à tête depuis mon arrivée.  Je n'avais, en effet, depuis ce jour bénit de mon existence, été qu'une ombre parmi les ombres. Silencieuse et secrète, n'adressant aux êtres mis sur mon chemin que de banales salutations polis sans m'attarder dans les détails d'une conversation pouvant durer longtemps, bien plus longtemps et pouvant surtout m'emmener sur des pistes dangereuses. Des recoins de mon for intérieur que je n'ose pour l'instant visiter. Pourtant en cet instant, je ne me comprenais plus. Moi la timide, l'égarée dans cette quête tortueuse, je m'approchais de la jeune femme afin d'aborder ma première vrai discussion depuis plusieurs mois maintenant. Un simple mot franchissait mes lèvres :

Vous...

Je frissonnais, à l'idée d'être sortis de mon mutisme. À l'idée que cette parole serait surement la première d'une longue suite, le premier pavé sur le chemin de ma destinée. Sur la longue route menant à la vérité, à ma vérité.

sa voix raisonne dans le silence presque religieux du lieux. vous ça sonne comme une accusation. vous, vous qui avez hanté mes nuits, vous qui avez pris mon mari, vous qui avez renversé mon chat, vous qui souillez le monde de vos pas. pourtant cette fille, ellie ne la connait pas. son visage aux traits fins n'a jamais heurté ses prunelles. elle s'en serait souvenue sinon. de sa bouche pulpeuse au moins, de ses yeux clairs, si semblables à l'eau qui miroitait à quelques mètres de là. inconnue, inconnue au bataillon, la demoiselle, une brebis égarée qui n'a plus toute sa tête ? ellie hausse les épaules et lui offre un petit sourire en coin, cette grimace au bord de la moquerie, du mépris. elle ne lui veut pas de mal pourtant. c'est instinctif, animal, c'est comme ca, une fatalité. comme une tragédie. ellie soupira et finit par lâcher. moi ? elle ne se moque pas d'elle, des voyageurs fêlés il y en a eu. l'île semble attirer les âmes en peine, les égarés, les aventuriers en quête de vérité. je m'appelle ellie, enchantée ! c'est bête, complètement cru comme approche. après tout, elle ne veut pas mettre cette fille-là dans son lit. alors à quoi bon jouer la carte du mystère ? se mettre à nu, elle ne l'avait plus fait depuis longtemps. et quoi de mieux qu'une cascade pour fêter l'occasion ? j'étais venue pour piquer une tête avant que le reste des voyageurs ne viennent infester cet endroit.. ils ne respectent rien, ces occidentaux, pas même la nature. vous voulez vous joindre à moi ? son sourire se fait plus franc, plus vrai. elle n'est pas comme juliet, n'a pas ce charme venimeux qui lui fait perdre la tête. aujourd'hui serait une journée pleine de surprise.